Château de La Tourette
A
trois kilomètres sud de Vernoux, dans un site sauvage, dominant le
torrent qui gronde à ses pieds, La Tourette, nid d’aigle tout déchiqueté
par le temps est encore fièrement campé sur son rocher. L’énorme
donjon, aux larges blessures, et que couronnent des lambeaux de corbeaux
et de mâchicoulis, est encore debout. Deux donjons s’élevaient en cet
endroit, reliés, sans doute, par des remparts crénelés et bastionnés
selon l’art de la défense au moyen-âge, car le château de La Tourette
est un de nos vieux témoins de notre histoire féodale. Une famille de ce
nom la possédait dès le commencement du XIIIe siècle, sinon avant. Les
de La Tourette s’éteignirent, en 1330, en la personne de Hugon de La
Tourette, tué à Tournay, en Flandre. Il avait épousé, en 1327, Alix,
fille de noble Géranton de La Marette. Hugon de Chambaud, son neveu, lui
succéda et transmit cette seigneurie à Jean de Chambaud, qui, en 1371,
la partagea avec Durand de Caume ou de La Champ de Calma. En 1420,
Antoine de Chambaud hérita de Raymond de Caume, coseigneur de La
Tourette, et réunit la totalité de la seigneurie. M. de Lubac, dans une
notice sur Vernoux dans la Revue du Vivarais, 1894, nous fournit les
notes sur ce dernier Chambaud, seigneur de La Tourette.
"En 1544, le seigneur de La Tourette était Gabriel de Chambaud, qui
vivait en son château avec sa femme, Magdeleine de Joyeuse. Son fils
aîné Pierre devant lui succéder dans la seigneurie. Ses deux autres fils
étaient religieux. Jean était prieur et seigneur de Rochepaule, en
Velay, et Antoine était pourvu du prieuré d’Etoile, en Dauphiné. Il
avait en outre six filles, dont trois; Jeanne, Louise et Isabeau,
religieuses. Catherine, mariée en Languedoc, et Clauda à un gentilhomme
du Diois. Enfin Guillaumette était attachée à la personne de la comtesse
de Ventadour qui résidait au château de La Voulte avec son noble époux,
le comte Gilbert. Pendant que Guillaumette était auprès de la comtesse
de Ventadour, son mariage se décida avec Louis de Presles, écuyer,
seigneur de Vaussèches, du Chambon et de Geys, fils de Claude et
d’Izabel de La Blache. C’était la fille préférée de Madeleine de
Joyeuse. Le 12 novembre 1548, "demoyselle Magdeleine de Joyeuse fit une
donation, en sa faveur, Pierre de Chambaud étant mort". L’année
suivante, le mariage ayant eu lieu, en février, Magdeleine de Joyeuse
fit son testament, en date du 3 juillet 1549. En voici les principales
dispositions "Elle requiert sa sépulture en l’église Saint-Pierre à
Vernoux. Elle lègue à chacune de ses trois filles religieuses la somme
de cent livres tournois. A Catherine, naguères mariée au seigneur de la
Blanguette, au Bas-Languedoc, cinq cents livres tournois. A Messire
Antoine de La Tourette, prieur d’Estoile, icy présent, cinquante livres
tournois. A noble Jehan de La Tourette, seigneur dudit la Torrete, cinq
sols tournois. A demoyselle Claude, femme de Nicolas de Dye, cent livres
tournois. Enfin, elle institua héritière universelle demoyselle
Guilhomete de La Torrete, femme au seigneur de Vaulsèches. L’acte fut
fait en sa maison de Vernoux, en présence des témoins, etc". La terre de
La Tourette fut portée par Guilhomette de Chambaud, en 1549, à Louis de
Presles, seigneur de Vaussèches. Son successeur, Claude de Presles, fut
tué au camp de Baïx, en 1575, laissant une fille posthume, Marie, qui
épousa, en 1593, Guillaume de Ginestoux, seigneur de La Bastide. Leur
fils, Just-Henry de Ginestoux, marquis de La Tourette, seigneur de
Vernoux, Châteauneuf, Vaussèches, Durfort, Saint-Fortunat et Gluiras,
épousa, en 1632, Antoinette du Luc. Leur fille, Angélique, épousa, en
1666, Nicolas-Joseph de La Rivoire, baron de Vocance, comte de Chadenac,
seigneur de Baumes. Just-Antoine, son fils, épousa, en 1717, Marie
Violand de Portalès de La Chèze. La terre de La Tourette et celle de
Chalencon donnaient entrée aux Etats du Languedoc. (1)
Les vestiges du château, situés au sud-est de Vernoux-en-Vivarais,
occupent, en rebord de plateau, l’extrémité d’un éperon rocheux.
L’aspect tourmenté des reliefs et l’encaissement des cours d’eaux
placent ce château dans une position topographique évoquant une
fondation antérieure au XIVe siècle. Mais si les premières mentions du
site appartiennent au début du XIIIe, les vestiges visibles ne sont,
quant à eux, guère antérieurs au XVe siècle. L’élément central du
château est un gros donjon quadrangulaire construit en granit. Si vers
1900 au moins trois côtés sur quatre étaient encore conservés,
actuellement seule la face nord du donjon subsiste en élévation. Ce
donjon est cantonné au nord-ouest d’une étroite tourelle circulaire et
une échauguette, munie d’une petite ouverture de tir, protège l’angle
nord-est du bâtiment. La partie sommitale du donjon est couronnée de
mâchicoulis. L’ensemble de la construction, qui paraît à première vue
relativement homogène, évoque les gros donjons quadrangulaires à
vocation résidentielle affirmée que l’on construit à la fin du Moyen
Âge. Ainsi ce bâtiment pourrait avoir été construit dans le courant du
XVe siècle. Au-delà du fossé, en position de barrage, a été construite
une maison forte. Elle est bâtie sur une haute terrasse dont les murs
servaient à la fois de murs de soutènement et de rempart. Les vestiges
d’une échauguette étaient encore visibles au début du XXe siècle dans
l’angle sud-est de la plate-forme. Cette maison forte est constituée
d’un grand bâtiment rectangulaire orienté est-ouest, cantonné au sud-est
d’une tour d’escalier circulaire, dont la partie sommitale a
aujourd’hui disparu, la base d’une échauguette circulaire se dresse
encore dans l’angle nord-est du bâtiment. Celui-ci a connu manifestement
peu de remaniements, le dernier ayant eu toutefois pour conséquence
d’abaisser son niveau général. Au sud, une seconde construction de
petite taille fait face au corps de bâtiment principal ménageant au
centre une cour. Celle-ci est enclose : à l’est, une porte monumentale
est ouverte dans la courtine ; à l’ouest, cette dernière a disparu.
Éléments
protégés MH: l'ensemble des vestiges subsistants du château; les
façades et toitures de la maison-forte et du bâtiment des communs et la
terrasse : inscription par arrêté du 7 novembre 1996.
château de la Tourrette 07240 Vernoux-en-Vivarais
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